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COULEUR ET LUMIÈRE

Dans cette image, les contrastes forts ne se situent pas au niveau des valeurs. Les passages de l'ombre à la lumière se font de manière très subtile. Les zones sombres ne sont pas brutalement plaquées mais sont amenées par de doux camaïeux. L'image est assez claire, toute la surface de la fresque a à peu près la même valeur, mis à part les deux dauphins, qui marquent une zone sombre.

Il faut garder l'idée que la technique de la fresque induit un tel traitement des valeurs. En effet, les pigments mélangés à l'eau sont posés sur le mortier frais, qui en séchant fixe la couleur. Cette technique n'autorise pas l'empâtement, ni le fait de revenir ultérieurement sur le travail. Aussi, les couleurs posées en lavis successifs sont-elles très transparentes, et ne permettent pas d'obtenir des valeurs très sombres. D'autre part, la réaction chimique provoquée par le séchage du mortier à base de chaux donne une certaine unité aux différents tons, une douceur, une délicatesse spécifique à la fresque.

Si cette scène est peu contrastée dans ses valeurs, en revanche, on a un fort contraste de couleurs et de saturation. Les tons chauds de la chair s'opposent aux tons froids du ciel et de l'eau. Ici, la carnation est traitée avec beaucoup de délicatesse, dans une gamme de couleur vaste et nuancée. Le carmin fort saturé du drapé s'oppose à des tons plus rabattus, comme celui des dauphins ou de la mer.
Le drapé rouge emporté par le vent vers l'arrière laisse apparaître le buste de Galatée qui s'avance comme sortant d'une trouée. Cette impression est rappelée par la pose de la nymphe de gauche dont seuls le haut de son corps et la jambe droite sont apparents (comme pour Galatée). Le bras qui lui cache le ventre, la tire dans la même direction que celle du drapé rouge. Et de même que le personnage central elle sort de ces bras en se tirant vers l'avant.
Le rapport de couleur entre le tissu carmin et la chair de Galatée est repris par la peau rougie du personnage marin et la carnation pâle et rosée de la néréïde. En fait, ce premier contraste est transposé plus bas en un peu plus clair. Cet écho visuel renforce le mouvement ascensionnel jusqu'au visage central, les deux éléments étant sur une même ligne.

LES PERSONNAGES, L'ESPACE ET LA SCÈNE

Chez Raphaël on voit la très nette évolution de la représentation des personnages et de l'espace par rapport à ses premiers tableaux. Par exemple, dans la Résurrection de 1501, Raphaël reste proche de l'imagerie médiévale, car bien que l'on ait un espace avec différents plans, la taille des personnages est relativement proportionnelle à leur importance, et les poses restent figées.
Dans cette fresque, au contraire, les attitudes sont extrêmement libres et naturelles. Les volumes des corps sont modelés de façon sensible et vivante. Les personnages sont appréhendés par rapport à leur espace, dans une perspective totalement assimilée. D'ailleurs, ce traitement de l'espace permet d'amplifier les mouvements d'avancée ou de recul dans les attitudes.

La suite divine qui entoure Galatée de haut en bas, de droite et de gauche, l'entoure aussi d'avant en arrière : on a dans un premier plan l'Amour posé sur l'eau, ensuite le premier couple, puis, derrière le personnage central, on voit les deux musiciens et le second couple.
Ainsi, Galatée se trouve au centre de l'image, dans sa hauteur, dans sa largeur et dans sa profondeur. Sa pose résume en quelque sorte la totalité de la composition. Elle traduit la dynamique d'avancée qui s'oppose à celle du drapé qui la tire vers l'arrière, le mouvement contradictoire de ses bras tendus vers la droite, alors que le tissus flotte sur la gauche, les dauphins qui la traînent vers le bas, quand son regard se perd dans le ciel. Le peintre attache aussi une attention toute particulière à l'expression profondément humaine de la divinité. La douceur du visage et du rendu de la peau ne peut que rappeler l'admiration qu'a le peintre pour Léonard de Vinci.
Toute l'émotivité et la dynamique de la fresque sont traduits dans ce seul personnage. Galatée, tiraillée entre la mélodie du géant et son univers marin, prête une oreille rêveuse à cette musique. Elle se laisse entraîner par les dauphins à l'air cruel loin de celle-ci.


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